Photos Pitchfork Music Festival 2012 /// Jour 1
Pour le premier jour de la deuxième édition du Pitchfork Music Festival à la Grande Halle de la Villette (Paris), DIIV enchante, M83 déçoit, Factory Floor surprend, Japandroids réveille les morts, Sébastien Tellier picole… Retour sur huit heures de musique (quasi) non-stop.
How to Dress Well, AlunaGeorge…
Il est 17h40 quand nous arrivons pour le premier jour de la seconde édition du Pitchfork Music Festival. Malgré une affluence notable devant l’entrée de la Grande Halle de la Villette et une impressionnante file d’attente à l’entrée des pass 3 jours (tous vendus cette année) l’ambiance peine à décoller en cette fin d’après-midi de jour férié. How To Dress Well vient de terminer son set de quarante minutes et les roadies s’activent sur la scène pour faire place nette à DIIV qui prendra le relais dès qu’AlunaGeorge aura terminé son concert.
Des Londoniens hip hop on distingue surtout Aluna Francis dans une tenue qui rappelle les meilleures heures de TLC version orientale, et qui malgré tous ses déhanchements ne parviendra pas à réchauffer l’ambiance d’une immense Halle à peine remplie, le public étant encore occupé à comprendre le fonctionnement des jetons d’achat et repérer les différents lieux du festival (bars, espace vente Rough Trade, espace vente SUPER où le festivalier peut se faire coiffer et observer d’un œil amusé des jeunes filles crocheter leurs produits en direct live).
DIIV, Factory Floor…
Le spectacle ne commence en effet réellement qu’avec l’arrivée sur scène de DIIV qui marquera beaucoup d’esprits comme souvenir du premier temps fort du festival. Les New Yorkais – menés par le guitariste de Beach Fossils, Zachary Cole Smith – souffre de quelques problèmes de niveau sonore sur la voix du chanteur au début du set, problème vite rétabli par un ingénieur du son réactif. C’est alors parti pour quarante minutes de concert puissant, révélateur de la capacité du groupe à livrer une prestation scénique de qualité. Le batteur Colby Hewitt occupe l’espace central, flanqué de part et d’autre par un guitariste et un bassiste déchaînés. Des faisceaux de lumière blancs et rouges balaient la scène, accentuant une impression d’énergie difficilement contenue, une sensation d’urgence qui n’est pas sans faire penser à Joy Division.
De l’autre côté de la salle, Factory Floor s’apprête à jouer. Après quelques bises et taffes tirées au dehors, les Londoniens font l’effet d’un électrochoc : il n’est que 19 heures et même si la techno répétitive et abrupte de Factory Floor est d’une efficacité indéniable, projections psychédéliques à l’appui, on se prend à regretter que le groupe passe si tôt, laissant la plupart des festivaliers hébétés devant tant de puissance sonore. Le public hésite, dodeline vaguement de la tête quand la musique appelle par ses montées lentes, explosions soudaines et chants incantatoires des soubresauts incontrôlables.
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Japandroids, Frànçois and the Atlas Mountains…
C’est pourtant une mise en jambe sans doute nécessaire pour l’arrivée de Japandroids. Le duo canadien met d’emblée la salle en émoi avec une présentation hurlée dans le micro qui plonge le public dans une ambiance de stade, et pour la première fois la salle commence à danser. S’ensuit un set rock à réveiller les morts qui ravive la salle pour quarante minutes. Par moments la voix du chanteur a des inflexions similaires à celle de Cedric Bixler (At the Drive-In), à d’autres on reconnaît une influence punk rock anglais avec la très nette touche des Clash. On ne s’ennuie pas, et c’est avec le sourire aux lèvres qu’on quitte ce live pour aller se rafraîchir un peu.
C’est Frànçois & The Atlas Mountains qui prend la suite à la place de Chairlift déprogrammé pour cause d’ouragan Sandy. Si la pop folk du groupe franco-britannique peut se révéler efficace dans une ambiance plus intime, la Grande Halle ne se prête pas du tout à leur musique qui semble se perdre dans l’étendue de la salle et, bien qu’une multitude d’instruments soient présents sur scène, le son est trop bas et le groupe ne peut pas lutter.
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John Talabot, Sébastien Tellier…
Enfin c’est l’heure de John Talabot qui réchauffe incontestablement l’atmosphère refroidie depuis Japandroids. Il est maintenant 21h30 et les festivaliers qui s’étaient rués aux stands burgers, hot dogs et autres tacos pendant la prestation de Frànçois & The Atlas Mountains reviennent en nombre pour assister au set de John Talabot récemment remarqué avec son premier album ƒIN. Les Catalans Oriol Rivolera et Ekhi Lopetegi ne se ménagent pas et insufflent une chaleur moite à la salle, chaleur déjà très présente sur l’album mais qui prend soudain une ampleur qui donne à la Grande Halle des airs d’Ibiza. Enchanté, le public danse tout son saoul pendant quarante minutes qui s’écoulent bien vite. Dès la moitié du concert cependant, une partie de la foule commence à migrer vers l’autre scène où Sébastien Tellier est attendu.
Le gourou de l’Alliance Bleue fait comme à son habitude une entrée sur scène grandiloquente et entame son set avec Pépito Bleu, également premier titre de My God is Blue. C’est réellement avec Cochon Ville que le public commence à être conquis. Devant la scène, les fans dansent. Le public devient très vite plus clairsemé dès lors qu’on s’éloigne un peu. Les festivaliers n’ayant pas encore dîné ont préféré John Talabot à Sébastien Tellier en attendant M83. Le Français a probablement perdu une partie de son public (plus de la moitié est étrangère) en faisant des discours d’une longueur démesurée en français qui semblent le lasser lui-même : il se prend à inviter le public à lui dire de « fermer [sa] gueule » et l’humour forcé commence à virer pathétique.
Sébastien Tellier joue sa partie jusqu’au bout, arrêtant son jeu de piano en plein milieu de Roche pour boire une gorgée de bière, fumant cigarette sur cigarette entre les morceaux. Enfin vient La Ritournelle, annoncée par l’artiste comme étant sa « poule aux œufs d’or ». Quand la longue intro au piano prend fin, la partie chantée surprend le public qui crie sa joie, et Sébastien Tellier arbore un petit sourire en coin qui en dit long. Content de lui, il terminera son concert par L’Amour et la Violence, titre qui tombe à point nommé pour clore ce set.
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James Blake, M83
James Blake prend le relais et reste dans la thématique, auréolé d’une lumière bleue qui confère une certaine froideur à son show. Après la grandiloquence de Tellier, la sobriété du Londonien est la bienvenue, poussant seulement un peu les basses pour donner du corps à ses morceaux. L’ensemble est très réussi et on quitte ce set curieux de voir la dernière prestation.
Dès l’intro du concert de M83, on réalise qu’en termes d’emphase, Tellier peut aller se rhabiller (c’est le cas de le dire, l’artiste était débraillé sur scène, sa chemise sortant de son pantalon laissait apparaître son ventre). La marionnette figurée sur la pochette de Hurry Up, We’re Dreaming fait donc une courte apparition pour annoncer le début du show, car c’est bien de ça dont il s’agit. Anthony Gonzalez et ses musiciens sont accompagnés ce soir par un orchestre symphonique qui ne trouvera sa place qu’à l’issue du concert, sur un seul titre. Il n’est utilisé sur les autres morceaux que pour des nappes instrumentales qui auraient été aussi bien exécutées sur un synthétiseur. L’ensemble est inaudible la plupart du temps et ne semble être présent que pour donner une caution artistique à la formation.
Ainsi le concert de M83 finit par devenir grotesque, ne faisant plus de la musique mais du divertissement, sensation renforcée par un light show hypertrophique, par une puissance sonore excessive mais également par un Anthony Gonzalez qui se voudrait fébrile et qui culmine dans la mièvrerie, n’ayant de cesse de remercier qui le festival, qui la salle et hurlant des « Paris, Pariiis, Pariiiiiiiis » qui achèveront de nous écoeurer.