Photos Britta Persson @ Le Centre Culturel Suédois 2012
Auréolée d’un troisième album, Current Affair Medium Rare, qui a réussi dès sa sortie en 2010 à éveiller la curiosité des critiques bien au-delà des frontières de sa petite Suède natale, Britta Persson était bien décidée à conquérir un public parisien réputé difficile. L’occasion allait lui en être donné par la quinzième édition du festival Les Femmes s’en Mêlent (dans toute la France du 20 mars au 1er avril), qui lançait sa campagne 2012 à l’Institut Suédois, par l’une des plus prometteuses fées Clochette de cette pop scandinave toujours aussi active, et toujours aussi rafraîchissante.
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En Suède, la ponctualité n’est pas un vain mot, et, pour cette première des deux dates que la programmation du festival Les Femmes s’en Mêlent réserve à Britta Persson au Centre Culturel Suédois à Paris, il ne faut pas être en retard. Le concert est complet depuis plusieurs jours déjà, et la petite centaine de privilégiés conviée à l’événement attend sagement, dans une ambiance très « Erasmus », l’ouverture des portes prévue à 19h30. Partagé entre le Café Suédois de la très agréable cour intérieure de l’Institut et les différentes expositions proposées aux étudiants suédois de la Capitale, le public s’imprègne donc du cadre impressionnant du lieu, mélange tout scandinave d’austérité lumineuse, de calme et de simplicité.
Ce n’est pas un concert de Motörhead auquel on est venu assister ce soir
Le timing étant respecté à la minute près, la petite salle cossu (qui ressemble bien plus à une salle de répétition idéale qu’à un repaire de rockeurs élevés à la bière et à la testostérone) se remplit maintenant peu à peu, dans un calme scrupuleux et presque mathématique, aussi efficace que détendu. C’est sûr, ce n’est pas un concert de Motörhead auquel on est venu assister ce soir, et la configuration « récital » de la salle, avec ses élégantes chaises design en bois laqué noir, ne fait que renforcer cette impression de sérénité, presque dépaysante.
A 20h précises, c’est seulement accompagnée par Per Nordmark, son fidèle percussionniste, que Britta Persson, aussi vive que menue, se fraye timidement un passage depuis les coulisses vers l’avant scène, où l’attendent deux rutilantes guitares Fender (une Mustang et une Telecaster), tandis que derrière elles un magnifique piano à queue attend pensivement que son heure sonne enfin.
Un timbre à la fois suavement aigu et tendrement éraillé
Sans plus de préambule, le set débute par Annoyed to Death, qui ouvre également le bal de Current Affair Medium Rare, le dernier, et le plus abouti des trois albums en date de la jeune femme. La batterie est sèche, et les riffs de guitare tranchants malgré un tempo légèrement plus lent que sur disque. L’acoustique de la salle (qui possède assurément tous les atouts propres à l’organisation de concerts de musique de chambre) est excellente, et permet à la voix de Britta Persson de dégager ce qu’elle a de plus singulier et de plus intéressant, un timbre à la fois suavement aigu et tendrement éraillé. L’ensemble est parfaitement calibré, et le refrain qui enfle peu à peu ne fait que confirmer la belle prestance en live du morceau, aussi rythmé qu’empreint d’une indéniable et profonde mélancolie.
Un petit « Bonsoir » pour la route, et Britta Persson enchaîne avec Cliffhanger, le single sur mesure de son deuxième album, Kill Hollywood Me, qui a contribué à populariser le travail de la jeune trentenaire Suédoise. A la fois pop et délicat, c’est une vraie petite douceur qui se savoure en aparté, mais sans complexes.
Le public ne peut s’empêcher de dodeliner de la tête en cadence
La suite est également très réjouissante. Avec Meet a Bear, Britta Persson tient peut-être désormais l’indispensable tube qui jusque-là faisait défaut à son répertoire, ce qui freinait quelque peu la connaissance que le grand public pouvait avoir de sa musique. Sur scène, l’efficacité du morceau se révèle imparable, et son refrain entraînant, voire enivrant, ne semble pas pouvoir finir de hanter les esprits du public, toujours aussi réservé, mais qui ne peut s’empêcher de dodeliner de la tête en cadence.
Sous les acclamations du public, Britta Persson s’installe maintenant au piano pour deux titres plus posés, et forcement moins pop, dont le fédérateur Some Girls and Some Boys, joué ce soir dans une belle version douce-amère à laquelle il ne manque que des chœurs à l’unisson pour être parfaite, et totalement dans l’esprit de ses paroles faussement naïves.
Le concert se termine d’ailleurs dans une apothéose de guitares saturées
Parmi les titres de Current Affair Medium Rare qui forment l’ossature logique de la setlist de ce soir, Britta Persson, la frange tombant toujours aussi impeccablement au niveau de ses yeux pétillants de malices, intercale régulièrement des petites perles inconnues de ses fans les plus assidus, et réussit ainsi à surprendre son auditoire avec ces titres inédits, très anciens pour la plupart, qui ne figurent sur aucun disque. C’est le cas notamment de Turqoise, de Sad Puppy, et du plus rythmé Foam Rubber, qui finit par convaincre la salle de l’indéniable talent d’écriture de Britta Persson, oscillant constamment entre la soie et la fournaise.
Le concert se termine d’ailleurs dans une apothéose de guitares saturées, avec le convainquant He Flies a Jet, sur lequel la jeune Suédoise se libère enfin totalement, entraînant à sa suite un public qui prend enfin la mesure du bon moment qu’il est en train de passer, et qui réagit en conséquence.
Un intermède très court, puis Per Nordmark et Britta Persson reviennent une nouvelle fois sur scène pour deux derniers titres en forme de conclusion finale, dont un Big Fuss très réussi, à l’image de la prestation de Britta Persson ce soir, presque trop propre. Il n’aura finalement manqué qu’un brin de folie émancipatrice pour que la soirée soit vraiment à la hauteur des espérances entrevues par ailleurs. Mais ce n’est que partie remise, et soyons sûrs que nous retrouverons bientôt la petite Suédoise devant un public beaucoup plus nombreux (et beaucoup plus bruyant), ce qui devrait assurément lui donner l’occasion d’exprimer la pleine puissance de ses possibilités nombreuses, mais encore à exploiter.
LA SET LIST COMPLÈTE :
ANNOYED TO DEATH
CLIFFHANGER
MEET A BEAR
TIME IS A HORSE
SOME GIRLS AND SOME BOYS
TURQOISE
CAN I TOUCH
SAD PUPPY
OH HOW WRONG
FOAM RUBBER
HE FLIES A JET
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BIG FUSS
ROBOT