Kurt Cobain : déjà 20 ans au Nirvana
A l’occasion des vingt ans de la disparition de Kurt Cobain, Pixbear a donné carte blanche à Mr. Grieves pour expliquer en quoi Nirvana et son frontman avaient changé sa vie. Vous pouvez réagir à cet article dans les commentaires et partager avec nous votre sentiment par rapport au songwriter. Kurt Cobain mérite bien d’être le « trending topic » de ce 5 avril 2014 !
« J’ai connu Kurt Cobain grâce à MTV… »
J’ai connu Kurt Cobain grâce à MTV. Voilà une accroche que le leader de Nirvana aurait certainement détesté et c’est bien fait pour lui. Au cours de l’été 1991, la chaîne musicale américaine diffuse pour la première fois le clip de Smells Like Teen Spirit et, immédiatement, je suis captivé par l’écran. Des pom pom girls au ralenti, un balayeur au ralenti, un gymnase en ébullition et Kurt Cobain sapé comme un clodo qui hurle face caméra « a denial » avec ce petit sourire ironique final. Quelques semaines plus tard, paraît Nevermind. Le 24 septembre 1991 plus exactement. Achat bien obligé du CD à la Fnac et écoute répétée de l’album au dernier rang de la classe au lycée au moyen d’un magnifique discman. Ah oui, au fait, j’ai 14 ans à l’époque et ça tombe plutôt bien puisque je fais partie de la génération soi-disant « X ».
Au début, Nevermind me fait penser aux Beatles pour les mélodies. Un sentiment un peu étrange, je l’admets, car, même si Kurt Cobain aime les Fab Four, avec le recul, l’album est plutôt orienté punk. A l’époque, la production de Butch Vig ne me choque pas et, 20 ans plus tard, je considère qu’elle donne à Nevermind une couleur hors du temps. Mais, revenons-en à Kurt Cobain, disparu il y a 20 ans jour pour jour. Après Nevermind, j’ai remonté le temps. Je suis passé à Bleach et, là, j’ai adoré le côté plus metal des compositions de ce premier essai (mise à part la chanson About a Girl qui ressemble à une ballade romantique pour adolescent prépubère). Les hurlements du frontman me donnaient des frissons et les riffs lourds et répétitifs m’ont définitivement convaincu de la valeur du compositeur.
« Le business a-t-il tué la passion ? »
Il fut alors temps de s’intéresser au personnage. D’abord, Kurt Cobain apparaît en surface comme un mec paumé d’Aberdeen, banlieue merdique de Seattle (Washington), qui veut à tout prix rester underground. On le voit en interview à moitié comateux envoyé chier les journalistes. Et pour ne rien vous cacher, ça faisait plaisir de voir un artiste pisser à la raie du business. Quelle erreur de jugement… Avec le temps, j’ai découvert toute l’ambivalence du personnage. Dès les débuts de Nirvana, Kurt Cobain veut que ça marche. Il inonde les maisons de disques de démos et parvient avec joie à signer chez le major Geffen avant la sortie de Nevermind. Parallèlement, il scrute chaque semaine les ventes d’albums, s’investit pleinement dans les visuels du groupe, les vidéos… Mais dès que le succès arrive, il n’assume plus son côté ambitieux et se défonce de plus en plus. Il se défonce aussi pour oublier ses maux d’estomac… Pourtant, quand on le voit en tournée avec Sonic Youth dans le documentaire The Year Punk Broke avant la sortie de Nevermind, il a l’air plutôt content de pouvoir vivre de sa passion.
Le business a-t-il tué la passion ? On est en droit de le penser. Mais ne serait-ce pas Kurt Cobain qui s’est détruit tout seul ? Il n’arrive plus à supporter Smells Like Teen Spirit… Il refuse de jouer son « tube » en concert. Cette chanson lui a ouvert les portes de la reconnaissance et il veut la détruire. Ambivalence, je vous dis. Toujours est-il que Kurt Cobain devient une icône et fait exploser les ventes de chemises à carreaux et de jeans troués… Et puis, quand il passe à Top of the Pops et livre une version au ralenti de Smells Like Teen Spirit pour protester contre le playback imposé par l’émission, comment ne peut-on pas l’applaudir des deux pieds ?
« Plus besoin d’avoir le niveau des requins de studio de Guns N’ Roses… »
Kurt Cobain attire également mon attention sur les groupes qui l’ont influencé et, pour cela, je ne cesserai de le remercier. Les Pixies, Sonic Youth, les Stooges, Devo, Gang of Four, The Knack (oui The Knack !), Mudhoney, PiL… je découvre de nouveaux mondes musicaux. A 15 ans, ça change la vie. Pour rappel, à l’époque, il n’y avait pas MySpace, Deezer, Spotify, BandCamp, SoundCloud, Wikipedia et YouTube. Découvrir de la musique était bien plus laborieux. Nirvana était au carrefour du punk, du post-punk, de l’indie rock et de la pop, un formidable catalyseur de tous ces styles.
Et puis, Kurt Cobain m’a aussi donné envie de jouer de la guitare, de monter un groupe avec dix chansons à quatre accords. Son talent résidait dans la simplicité des compositions et sa façon écorchée de les interpréter. Tout le monde pouvait donc faire de la musique. Alors, pourquoi n’en ferais-je pas également ? Plus besoin d’avoir le niveau des requins de studio de Guns N’ Roses… et ça, c’était plutôt libérateur.
« En vieillissant, le plaisir ne s’est pas dissipé »
Après avoir bien ingurgité Bleach et Nevermind, Geffen a décidé de sortir la compilation Insesticide, histoire de faire un peu de blé. Je lui ai donné bien volontiers mes Francs (et oui, à l’époque on avait encore des Francs dans les poches). Là encore, énorme plaisir à l’écoute de ces nouveaux titres, notamment Dive et Aneurysm, le premier et le dernier morceau du disque. Et puis cette reprise de Devo, Turnaround en plein milieu ! Quelle énergie ! Il ne faudra pas attendre trop longtemps pour voir arriver le troisième album In Utero. Avant sa sortie, on nous dit que les chansons sont si mal enregistrées que Geffen refuse de les sortir. Impossible de savoir si c’est un coup marketing… En tout cas, ça donne encore plus envie d’écouter l’album.
Cette fois-ci, Kurt Cobain travaille avec Steve Albini pour retrouver une caution indé et s’éloigner de la production de Nevermind qu’il a fini par détester. C’est d’ailleurs intéressant d’avoir lu récemment la lettre qu’avait envoyée le producteur au groupe pour travailler avec lui. Une lettre de motivation de plusieurs pages du mec qui enregistre en plaçant des micros à l’intérieur des fûts de batterie… Evidemment, j’achète l’album le jour de sa sortie. In Utero reçoit immédiatement mon adhésion. Il faut admettre que je n’ai plus alors trop de sens critique par rapport à Nirvana. En vieillissant, le plaisir ne s’est pas dissipé. La production est tout simplement énorme et les compositions excellentes. Very Ape, Tourette’s et Frances Farmer Will Have Her Revenge on Seattle font toujours partie des titres dont je ne me lasse pas. J’avoue ne pas avoir trop compris pourquoi Kurt Cobain avait accepté de faire dans la foulée un MTV Unplugged. Mais je mets cela sur le compte de l’ambivalence…
« Kurt Cobain sera aussi responsable du plus grand regret de mon adolescence »
Au delà de tous les plaisirs que m’a procuré Kurt Cobain, il sera aussi responsable du plus grand regret de mon adolescence. Celui de ne pas avoir vu Nirvana sur scène. Pourtant, le groupe est bien passé à Paris le 14 février 1994, le soir de mes 17 ans, mais je n’avais pas pris de place en me disant qu’il allait repasser plus tard. Je m’étais contenter de savourer son passage à Nulle Part Ailleurs. Grave erreur. Le 1er mars 1994, le trio donne son dernier concert. Le 5 avril 1994, l’icône se suicide à 27 ans d’une balle dans la tête. Et ça, je l’ai encore en travers de la gorge. Comment peut-on me faire ça à moi !?! Quel égoïste ! Quel artiste ! Décidément, ça va souvent bien ensemble…
Et pendant les 20 années suivantes : des lives, des inédits, des coffrets, des ré-éditions deluxe… sa maison de disques a recyclé tout ce qui était possible et, malgré cet acharnement marketing honteux, je n’ai jamais pu oublier Kurt Cobain. Peace, Love and Empathy.
Mr. Grieves
Publié le 05/04/2014
Kurt Cobain : les 22 bonnes paroles d’une icône grunge
Qu’on l’aime ou que l’on ne l’aime pas, il est difficile de nier l’impact qu’a eu Kurt Cobain sur la musique des années 90. Pour lui rendre hommage, Pixbear a rassemblé 22 citations qui en disent long sur la personnalité et les propres contradictions du défunt leader de Nirvana.